Carmen 62 (in French by Maurice Rat) |
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Les jeunes gens
Voici Vesper, jeunes gens, levez-vous : Vesper dresse enfin sur l'Olympe son flambeau longtemps désiré ; il est temps de se lever, de quitter les tables somptueuses. La vierge va venir, bientôt vont retentir les chants d'hyménée. [5] Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes filles
Voyez-vous, jeunes filles, ces jeunes gens ? Levez-vous pour les combattre ; car déjà l'étoile du soir montre ses feux au-dessus de l'Oeta. Oui, aucun doute. Voyez quel est leur empressement à quitter le banquet ! Sans doute ce n'est pas sans dessein qu'ils se sont élancés : ils vont chanter, leurs chants seront dignes de la victoire. [10] Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes gens
Compagnons, la palme n'est pas facile et toute prête ; voyez ces jeunes filles répéter entre elles ces chants qu'elles ont longtemps médités. Ce n'est pas en vain qu'elles se concertent : elles tiennent quelque chose qui sera digne de mémoire. Doit-on s'en étonner ? Un seul objet occupe le fond de leurs pensées. [15] Mais nous, tandis que nous prêtons l'oreille à leurs chants, notre esprit est ailleurs. Nous serons justement vaincus ; la victoire aime l'effort. Du moins, recueillons nos esprits pour le combat qui s'apprête : elles vont se mettre à chanter, nous devons leur répondre. Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes filles
[20] Vesper, est-il parcourant le ciel un feu plus cruel que le tien ? C'est toi qui peux arracher une fille aux embrassements de sa mère, arracher aux embrassements de sa mère une fille qui veut en vain la retenir, et livrer à un jeune homme ardent une chaste vierge. Que feraient de plus cruel les ennemis dans la ville qu'ils ont prise ? [25] Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes gens
Vesper, brille-t-il au ciel un feu plus aimable que le tien ? Tu sanctionnes, par ta flamme, les noeuds d'un hymen convenu, d'un hymen arrêté d'avance entre les parents et l'époux, mais qui n'est jamais consommé qu'après l'apparition de ta lumière ardente. [30] Que donnent les dieux de plus désirable que cette heure fortunée ? Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes filles
Amies, Vesper enlève l'une de nous...
Les jeunes gens
À ta venue toujours les gardiens veillent. La nuit cache les ravisseurs ; mais souvent, Vesper, tu les prends sur le fait, [35] lorsque, changeant de nom, tu recommences ton cours... Laisse ces vierges t'adresser des semblants de reproches. Que t'importe si leur bouche se plaint, puisque tout bas leur coeur te désire ! Hymen, ô Hyménée ; viens, Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes filles
Comme une fleur, cachée dans un jardin clos, [40] croît ignorée du troupeau, respectée du soc meurtrier ; les brises la caressent, le soleil l'affermit, la pluie la nourrit ; elle est désirée par beaucoup de garçons, par beaucoup de jeunes filles ; mais, à peine cueillie du bout de l'ongle, elle s'est fanée, flétrie ; elle n'est plus désirée par aucun garçon, par aucune jeune fille : [45] ainsi la vierge, tant qu'elle reste intacte, est chère aux siens ; mais quand, le corps pollué, elle a perdu sa chaste fleur, pour elle les jeunes gens n'ont plus d'amour, les jeunes filles n'ont plus d'amitié. Hymen, à Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
Les jeunes gens
Comme une vigne solitaire croît dans un champ inculte, [50] ne s'élève jamais, jamais ne porte de doux raisins ; mais sous le poids qui entraîne son corps tendre fait bientôt ramper ses rameaux au niveau de ses racines ; jamais le vigneron, jamais le taureau ne la cultivent ; mais que l'hymen l'unisse à l'ormeau, [55] vignerons et taureaux la cultivent à l'envi. Ainsi la vierge, tant qu'elle demeure intacte, vieillit privée de soins ; mais lorsque, mûre pour l'hymen, elle contracte une union assortie, plus chère à son époux, elle n'en devient pas moins chère à son père.
Et toi, vierge, ne résiste plus à un tel époux. [60] Tu ne peux, sans injustice, résister à celui qui t'a reçue des mains d'un père, d'un père et d'une mère auxquels tu dois obéir ; ta virginité n'est pas à toi tout entière, elle est en partie à tes parents, un tiers en a été donné à ton père, un tiers à ta mère, tu n'en as à toi que le tiers. Cesse de résister à la double autorité de tes parents, [65] qui ont remis à leur gendre leurs droits avec ta dot. Hymen, ô Hyménée ; viens Hymen, ô Hyménée !
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© copyright 9-7-2004 by Maurice Rat |
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