Hier, Licinius, tous les deux de loisir, nous avons, comme nous en étions convenus, couvert nos tablettes de jeux d'esprit ; chacun de nous, écrivant des versiculets, s'amusait tantôt dans un mètre, tantôt dans un autre ; et donnait la réplique à l'autre au milieu de la joie du vin. Je t'ai quitté, Licinius, tellement enthousiasmé du charme de ton esprit que, loin de toi, tous les mets semblaient fades à ton malheureux ami et qu'un calme sommeil ne fermait plus ses yeux ; agité dans mon lit d'une fureur que rien ne pouvait calmer, je me retournais en tous sens, appelant de mes voeux le retour de la lumière pour m'entretenir avec toi et pour être avec toi. Mais, lorsqu'enfin, épuisé de fatigue, je suis retombé presque mort sur mon petit lit, j'ai composé ces vers pour toi, mon aimable ami, pour te faire connaître mes regrets. Garde-toi maintenant d'être hardi ; garde-toi, mon petit oeil, de repousser mes pièces, ou crains que Némésis ne te punisse : c'est une déesse redoutable, garde-toi de l'offenser !